Inaptitude professionnelleInaptitude : les derniers arrêts rendus
Plusieurs arrêts rendus ces deux derniers mois apportent des précisions sur le régime de l'inaptitude : périmètre du reclassement, calcul du salaire repris, étendue du remboursement des allocations chômage... Nous vous présentons une synthèse de ces décisions.
Cass. soc., 9 janv. 2019, n° 17-21.513
Cass. soc., 19 déc. 2018, n° 17-18.916
Cass. soc., 12 déc. 2018, n° 17-21.126
Cass. soc., 12 déc. 2018, n° 17-20.801
Cass. soc., 5 déc. 2018, n° 17-18.170
Cass. soc., 28 nov. 2018, n° 17-21.654
Cass. soc., 28 nov. 2018, n° 17-21.654
L'inaptitude reste un domaine important de contentieux, en raison de la difficulté de connaître les règles applicables suite à des réformes successives, des imprécisions des textes portant sur la reprise du salaire lorsqu'aucune décision n'a été prise un mois après le constat de l'inaptitude, du formalisme complexe. Preuve en est la liste des arrêts de la Cour de cassation, rendus ces deux derniers mois, figurant dans le tableau ci-après.
Solution énoncée
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Précisions
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Origine professionnelle de l'inaptitude
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Il ne suffit pas de dire que l’employeur avait connaissance du lien, à tout le moins partiel, des arrêts de travail du salarié avec une maladie professionnelle. Les juges du fond doivent vérifier que l’inaptitude constatée par le médecin du travail avait au moins partiellement une origine professionnelle (Cass. soc., 28 nov. 2018, n°17-21.654).
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C’est au salarié de rapporter la preuve d’un lien de causalité entre l’accident et l’inaptitude à son poste (Cass. soc., 5 oct. 2011, n° 08-42.909). Si aucun élément ne permet de considérer que l’inaptitude physique du salarié est la conséquence de l’accident du travail dont il a été victime, les règles spécifiques applicables à l’inaptitude d’origine professionnelle doivent être écartées (Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-22.285).
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Recherche d'un reclassement
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C'est à l'employeur de tirer les conséquences du refus du médecin de travail de donner lui-même son avis sur le poste de reclassement envisagé. (Cass. soc;, 9 janv. 2019, n° 17-21.516).
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L'employeur doit prendre en considération les propositions du médecin du travail, au besoin en les sollicitant. Mais le licenciement pour inaptitude ne peut pas être invalidé au seul motif que le médecin n'a pas exprimé un avis sur le poste de reclassement envisagé.
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Périmètre du reclassement : preuve de l'existence d'un groupe
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Il est nécessaire que le salarié invoque, à l'audience, l’appartenance de la société à un groupe. Ce n’est pas une question soulevée d’office par les juges (Cass. soc., 19 déc. 2018, n°17-18.916).
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L'employeur doit justifier de l’impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise ou, le cas échéant au sein d’entreprises du groupe auquel elle appartient dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation assurent effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. Le fait que le salarié ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un groupe ne suffit pas à caractériser l’absence de groupe (Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-19.618), mais encore faut-il que cette question soit évoquée dans les conclusions écrites pour être discutée.
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Impossibilité de reclassement : exigence d'un écrit
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Même si la lettre de licenciement indique le motif précis de licenciement et les étapes successives ayant conduit au licenciement, le fait que l’employeur n’ait pas fait connaître par écrit les motifs s’opposant au reclassement, avant que ne soit engagée la procédure de licenciement, rend la procédure de licenciement irrégulière et ouvre droit à indemnisation (Cass. soc., 28 nov. 2018, n°17-20.068).
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Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement, avant que ne soit engagée la procédure de licenciement (C. trav., art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12). A défaut, c'est une irrégularité de forme ouvrant droit à indemnisation. Ni une information verbale ni la lettre de licenciement ne peut palier l'absence de cet écrit (Cass. soc., 10 mai 2005, n°03-43.134).
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Reprise du salaire à l'expiration du délai d'un mois :
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Fin du versement du salaire Le salaire est dû jusqu’à la présentation de la lettre de licenciement et non jusqu'à la date d'envoi de cette lettre ; il importe peu que le salarié ne puisse pas exécuter un préavis en raison de son inaptitude (Cass. soc., 12 déc. 2018, n°17-20.801).
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Si à l'issue d'un délai d'un mois après le constat d'inaptitude, le salarié n'est ni reclassé ni licencié, l'employeur est tenu de lui verser à nouveau son salaire (C. trav., art. L. 1226-4 et L. 1226-11).Un arrêt antérieur laissait penser que la reprise du paiement des salaires s’arrêtait à la date d’envoi de la lettre de licenciement : " la cour d'appel ne pouvait allouer un rappel de salaire au-delà de la date d'envoi de la lettre de licenciement"(Cass. soc., 12 oct. 2011, n° 10-15.258). Désormais, la Cour de cassation distingue bien entre la date de la rupture du contrat (date d'envoi de la lettre) et la date d'effet de la rupture (date de présentation).
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Droit à la prime de vacances Dans la mesure où l’indemnité de congés payés est due en raison du maintien du salaire antérieur à la suspension du contrat de travail, la prime de vacances liée à cette indemnité de congés prévue par la convention collective applicable, est également due (Cass. soc., 5 déc. 2018, n°17-18.170).
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Le salaire correspondant à l'emploi que le salarié occupait avant la suspension de son contrat de travail et au paiement duquel l'employeur est tenu comprend l'ensemble des éléments constituant la rémunération du salarié et ouvre droit, par application de l'article L. 3141-22 à une indemnité de congés payés (Cass. soc.,25 janv. 2012, n°09-71.461 et Cass. soc., 5 déc. 2018, n°17-18.170). Le fait que le salarié ne soit pas présent importe peu pour l'octroi de cette indemnité.
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Remboursement des allocations chômage en cas de nullité du licenciement
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La possibilité de demander à l'employeur le remboursement des allocations chômage versées au salarié lorsque le licenciement pour inaptitude est frappé de nullité n'est ouverte que pour les licenciements prononcés à compter du 10 août 2016 (Cass. soc., 12 déc. 2018, n°17-21.126).
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Avant la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, le remboursement par l’employeur de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, prévu par l'article L. 1235-4 n'était pas applicable au licenciement prononcé en violation des règles particulières aux salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ( Cass. soc., 11 janv. 2017, n°15-10.594). La loi du 16 août 2016 a élargi les cas dans lesquels le juge peut ordonner le remboursement des allocations chômage, notamment en cas de licenciement frappé de nullité pour violation du statut protecteur des salariés victime d’accident du travail. Mais ces nouvelles règles ne s'appliquent pas aux licenciements prononcés avant l’entrée en vigueur de la loi du 8 août 2016. En effet, la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a pas d’effet rétroactif, sauf rétroactivité expressément décidée par le législateur.
Remarque : par ailleurs, depuis le 1er janvier 2019, le directeur de Pôle emploi peut, après mise en demeure, délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition de l’employeur débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d'un jugement et confère le bénéfice de l'hypothèque judiciaire ( C. trav., art. L. 1235-4).
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